Le 16 mai 2011

Sur la terre des rennes

Marc-Étienne Lebeau, collaboration spéciale

Étudiant de quatrième année au baccalauréat en génie informatique, Marc-Étienne Lebeau a choisi d'aller vivre en Finlande le temps d'un stage et d'un trimestre d'études. Son séjour de huit mois dans ce pays où demeurent les rennes lui donnera également la chance d'apprendre une nouvelle langue. Il y demeurera jusqu'au printemps.

Après un périple de deux semaines qui m'a fait traverser 10 pays d'Europe, me voici enfin arrivé à destination. Ici, les journées sont co­urtes, froides, et les Finlandais ont la réputation d'être peu bavards. Invitante, la ­Finlande? Je rêvais pourtant d'y faire un stage depuis très longtemps et j'ai travaillé très fort pour l'obtenir. Je n'ai malheureusement pas de réponse rationnelle à offrir à la personne qui me demanderait pourquoi j'ai choisi la Finlande et ses 5,5 millions d'habitants. Sans doute pourrais-je lui répondre que, comme l'anglais est ici relégué au troisième rang, après le finnois et le suédois, je n'y suis pas venu pour pratiquer ma langue seconde. En réalité, le fait de savoir que j'aurais ici la chance d'apprendre une langue très différente de la mienne rendait ce pays encore plus intéressant à mes yeux.

Au premier coup d'oeil, la Finlande ressemble beaucoup au Québec. Les forêts et les lacs sont très nombreux (188 000, en fait) et le relief est rela­ti­vement plat. La différence se fait surtout sentir lorsqu'il me faut un dictionnaire et 15 bonnes minutes pour déchiffrer les instructions qui me permettent de préparer adéquatement ma sauce pour boulettes de viande. Je voulais être dépaysé et j'ai été servi. En revanche, la nourriture, elle, n'a rien de déroutant, du moins si je me fie au menu de la cafétéria. En fait, l'alimentation des Finlandais ne m'apparaît pas très variée; il me ­suffira d'apprendre à bien prononcer en finnois les mots riz, pommes de terre, poulet, poisson et salade pour être en mesure d'obtenir facilement un repas typique.

Les premières journées sont difficiles. En mettant le pied dans ma chambre mal éclairée, je ne sais plus si j'ai encore envie de passer huit mois ici. Heureu­sement, quelques jours seulement sont nécessaires pour que je constate à quel point le monde est petit : deux individus, que j'ai rencontrés dans un concert rock, se révèlent être des chargés de cours du département au sein duquel je fais mon stage. L'un d'entre eux dit même avoir un lien de parenté avec les membres d'un de mes groupes de musique préférés.

Difficile de savoir s'il dit la vérité. Mais j'ai finalement l'impression que je vais réussir à me plaire ici.

Après le choc initial

Malgré la neige qui tombe déjà depuis la mi-octobre, la ville de Tampere, où j'habite depuis maintenant trois semaines, me semble plus chaleu­reuse et accueillante chaque jour. Avec ses 200 000 habitants, il s'agit de la deuxième ville en importance de la Finlande. Son centre-ville à ­l'architecture envoûtante lui donne l'allure d'un village paisible, même à l'heure de pointe.

Je m'attendais à avoir beaucoup de temps à tuer le soir et les fins de ­semaine mais finalement, les heures ­filent trop rapidement pour que je puisse accomplir toutes les tâches ­inscrites à mon agenda. Lorsque je ne suis pas assis dans ma classe de finnois ou en train de faire mes devoirs, je me retrouve sur un navire en direction de l'Estonie ou encore dans un chalet perdu dans les bois en compagnie d'un groupe d'étudiants étrangers dont j'ai fait la connaissance une semaine plus tôt. Les Finlandais semblent difficiles d'approche, mais tout comme les Québécois, ils deviennent particu­liè­re­ment sociables après avoir consom­mé quelques bières!

Une grande partie de mon temps est consacrée à mon stage à l'Université technique de Tampere (Tampere ­University of Technology [TUT] ou encore Tampereen Teknillinen Yliopisto en finnois). Bien que je ne sois pas anglophone, je participe à l'amélioration du matériel technique utilisé dans les cours offerts en anglais au TUT. Je constate, moi qui suis ­inscrit au trimestre d'hiver, que plusieurs cours dont j'aurai lu les notes seront à mon horaire.

Je crois qu'il conviendrait maintenant d'écrire quelques mots sur la passion, ou plutôt le fanatisme, des habitants pour le sauna. On en trouve un dans toutes les maisons, et pour les Finlandais, il s'agit d'une activité quotidienne qu'il serait sacrilège de négliger. La preuve : mon colocataire quitte quotidiennement ­l'appartement vers 23 h pour savourer un sauna bien chaud. Les Finlandais organi­sent même des «sauna parties» pour fêter des événements de toutes sortes et, durant l'hiver, ils vont uida avannossa (nager dans un trou de glace). Le concept est simple : il faut se tenir dans un sauna incroyablement chaud aussi long­temps que le corps peut le supporter, pour ensuite sauter dans un lac à l'endroit où un trou a été creusé dans la glace... Il faut l'essayer avant de déclarer que les ­Finlandais sont des personnes normales.

Qu'est-ce qui m'attend maintenant?

Même si je ne suis en Finlande que depuis un mois, je considère que, déjà, j'ai vécu énormément de moments mémorables. Parmi les activités qui m'attendent il y a, notamment, une fin de semaine à Stockholm, en Suède, et un voyage en Laponie, au nord de la Finlande. Ce dernier me permettra de rendre visite à l'unique et véritable père Noël, dont les Finla­ndais sont si fiers, et de confirmer si ses rennes peuvent réellement voler. On m'a aussi invité à passer le ­temps des fêtes dans le sud de l'Allemagne. Je ne prévois donc pas avoir beaucoup de temps pour m'ennuyer.

Toutefois, je ne peux pas cacher le fait qu'il y a des moments où j'aimerais retour­ner au Québec pour y passer quelques jours et retrouver ma «zone de confort», ma famille et mes amis. Écouter un de mes groupes américains préférés suffit géné­ralement à me rappeler d'où je viens et à me permettre de retrouver ma bonne humeur. Par ailleurs, je rencontre chaque jour de nouvelles personnes, et mes efforts assidus pour apprendre la langue finnoise commencent à porter leurs fruits. Parions que d'ici quelques ­semaines, les Finlandais me paraîtront plus bavards!

* L'auteur tient à remercier l'organisme International Association for the ­Exchange of Students for Technical Experience ainsi que le TUT de lui offrir la chance de vivre une telle expérience.